Pluie Noire

 

Un film de Shohei Imamura

 

D’après le roman Masuji Ibuse

 

Avec Yoshiko Tanaka, Kazuo Kitamura, Etsuko Ichihara, Shoichi Ozawa, Norihei Miki, Keisuke Ishida

 

 

Pluie Noire, adapté du roman éponyme de Masuji Ibuse, relate l’après-Hiroshima et ses conséquences désastreuses sur la vie de toute une population et la société japonaise.

 

Il évoque une « famille », une jeune fille, son oncle, sa tante, et sa grand-mère. Condamnés par les radiations subies lors du bombardement d’Hiroshima, l’oncle et la tante cherche désespérément un mari pour la jeune fille, malgré les rumeurs persistantes qu’elle aussi ait été victime de « L’Eclair » et soit donc aussi condamnée.

 

De prime abord, on est saisi par le noir et blanc qu’a choisi Imamura pour ce film, un choix qui nous plonge directement dans l’ambiance post-apocalyptique de l’époque. Les images, brèves, de la catastrophe en elle-même suffisent à glacer. L’errance des gens blessés, brûlés, irradiés, ou survivants est un calvaire qui se termine pour beaucoup après quelques heures ou quelques jours. Buvant l’eau contaminée, ils mourront dans des souffrances atroces.

 

Et il y a cette pluie noire évoquée par le titre, celle qui tomba sur Hiroshima peu de temps après le bombardement, mélange de poussière, de corps calcinés, de particules irradiées, qui provoqua la mort de ceux qui burent ses gouttes.

 

Imamura n’a pas un réalisé un mélodrame larmoyant, il n’affiche la souffrance que brièvement, se concentrant d’abord sur l’envie de vivre des survivants, cette lutte permanente contre le mal inconnu, incurable, destinée inéluctablement à la mort. La destinée de ses personnages, auxquels on s’attache très vite, est guidée par cette lutte contre la mort, une course qui peut s’arrêter de manière brève et rapide.

 

Imamura n’oublie pourtant pas de saupoudrer de l’humour et de l’amour sur cette toile de fond très pessimiste. Il montre le quotidien des pêcheurs irradiés, celui d’un sculpteur légèrement fou lorsqu’il entend un moteur qui lui rappelle celui des chars américains attaquant son ancienne unité de combat.

 

Pluie Noire évoque aussi le code de l’honneur au Japon, toujours très présent mais sans commune mesure par rapport à ce qu’il était encore en 1950. L’oncle et la tante sacrifient ce qu’ils ont pour que leur nièce puisse se marier, dans la dignité. C’est pourtant l’amour le plus sincère, celui du jeune fou, qui sera le bon, celui qui l’accompagnera….

 

Pluie Noire est un film qui a une grande valeur, sans juger il montre l’infamie de la bombe atomique, ses répercussions sur une population qui ne demandait rien d’autre que l’arrêt de la guerre et une paix durable.

 

L’oncle, incarné par Kazuo Kitamura, a d’ailleurs cette phrase vers la fin du film, il dit « les hommes ne comprendront donc jamais ». Au vu des 60 dernières années, et encore plus des 25 dernières, on peut facilement répondre que non. La barbarie de l’homme emporte l’homme et l’humanité toute entière vers un chaos inexorable. L’homme doit pourtant savoir mettre de côté ses rancoeurs, ses intérêts personnels pour l’intérêt de l’humanité, la sauvegarde de notre planète.

 

Pluie Noire est un film à découvrir, pour ses comédiens attachants, pour sa réalisation sobre et efficace, pour l’histoire qu’il raconte.

 

Pour ne pas oublier.

 

Arnaud Meunier

14/08/2005